
Depuis son accession au pouvoir en 2016, Faustin-Archange Touadéra a progressivement perdu son monopole sur la gouvernance de la République centrafricaine. Aujourd’hui, il règne davantage par la peur et la répression que par une véritable autorité politique.
Derrière l’image d’un président fort, on observe en réalité un chef d’État sous influence, incapable de tenir son pays sans l’appui de forces étrangères et sans user de la répression contre son opposition.
Les récents événements à Bangui, illustrent bien l’absence totale de souveraineté politique de Touadéra. Son incapacité à gérer la contestation démocratique l’oblige à recourir à la force, et ce, contre ses propres concitoyens.
Le 23 mars dernier, Anicet Georges Dologuélé, ancien Premier ministre et figure de proue de l’opposition, a été empêché de tenir un meeting à Bégoua, une intervention brutale menée par la gendarmerie nationale sur « ordre venu d’en haut ». Une phrase qui en dit long : si le président avait réellement la main sur son pouvoir, aurait-il besoin de faire taire ses adversaires plutôt que de les affronter démocratiquement ?
Même scénario pour Henri-Marie Ndondra et Dominique Yandocka, deux autres figures de l’opposition, victimes de pressions, d’intimidations et de restrictions dans leurs activités politiques. ‘’ Lorsqu’un régime en vient à bâillonner ceux qui contestent son autorité, c’est le signe d’un pouvoir qui n’a plus confiance en lui-même ’’.
Touadéra n’a pas seulement perdu le monopole de la gestion politique, il a également sacrifié l’indépendance de la Centrafrique. Pour se maintenir au pouvoir, il a livré son pays à des puissances étrangères, notamment à la Russie et aux mercenaires de Wagner, qui assurent sa protection mais contrôlent désormais les ressources naturelles et les leviers sécuritaires du pays.
L’ironie est frappante : pendant qu’il réprime l’opposition nationale, il laisse des forces étrangères dicter l’agenda politique et économique de la RCA. Peut-on encore parler d’un président qui gouverne, ou simplement d’un chef d’État tenu en laisse par ses soutiens extérieurs ?
Un troisième mandat, le rêve d’un président en sursis
Le problème de Touadéra ne réside pas uniquement dans sa gestion autoritaire, mais surtout dans son absence de vision politique. Après neuf ans à la tête du pays, le régime en place est à bout de souffle. Il n’offre aucune alternative économique viable, aucun projet de relance sociale, et s’accroche uniquement à l’idée d’un troisième mandat pour survivre.
Mais pourquoi chercher un troisième mandat si lui-même ne dirige plus vraiment ? C’est toute l’absurdité du système actuel : un président qui veut rester au pouvoir alors qu’il n’a plus les moyens d’exercer une véritable autorité sur son propre État.
Le 4 avril 2025, l’opposition appelle à une grande marche pacifique pour défendre les acquis démocratiques et refuser la confiscation du pouvoir. Ce sera un test décisif pour voir si Touadéra est encore capable de faire face à la contestation autrement que par la répression.
Car en fin de compte, la vraie question n’est pas de savoir si Touadéra a peur de l’opposition, mais s’il a encore la capacité d’incarner un véritable leadership national. Pour l’instant, tout indique qu’il est plus otage que maître de son propre pouvoir.