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Il y a des silences qui en disent long. Celui des autorités centrafricaines face à la multiplication des attaques armées, comme celle du 14 mai près de Ouadda dans la Haute-Kotto, est de ceux-là. Tandis que les Forces armées centrafricaines (FACA) encaissent coup sur coup, et que des préfectures entières (Ouham, Ouham-Fafa, Ouham-Pendé, Vakaga) résonnent du bruit des kalachnikovs, le pouvoir de Bangui semble s’en remettre à une milice étrangère : les hommes de Wagner.
 Ce qui fut présenté comme un partenariat stratégique avec la Russie est désormais une sous-traitance éhontée de la sécurité nationale.

Plutôt que de renforcer son armée nationale, de restructurer ses institutions ou d’investir dans l’équipement et la formation de ses soldats, l’État centrafricain a choisi l’option la plus courte, mais aussi la plus humiliante : louer sa souveraineté à des mercenaires étrangers.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Les Wagners ne défendent pas la Centrafrique. Ils protègent un régime, sécurisent quelques axes stratégiques, et exploitent des ressources minières en toute impunité. Le reste du territoire ? Livré aux groupes armés, aux trafiquants et à la peur.

Pendant que le pouvoir pavane à Bangui, le peuple meurt dans le silence des zones reculées, oublié, trahi.

Ce recours massif à Wagner envoie un signal clair aux FACA : « vous êtes inutiles ». Comment motiver un soldat quand la défense du pays est confiée à des étrangers ? Quelle crédibilité accorder à une armée qui n’est appelée qu’en second rideau, derrière les fusils russes ? Et comment bâtir une paix durable quand les garants de la sécurité nationale sont eux-mêmes liés à des intérêts économiques opaques et à des pratiques controversées ?

Un pouvoir sans colonne vertébrale

Au lieu d’assumer la responsabilité d’un État, les autorités se cachent derrière le rideau de fumée du partenariat russo-centrafricain. Mais ce rideau est troué. À mesure que les élections approchent, l’insécurité s’intensifie. Le vernis s’écaille. Et il devient évident que le gouvernement n’a ni stratégie, ni vision, seulement une obsession de survie politique, au prix même de l’abandon de pans entiers du territoire.

Un pays ne se bâtit pas sur la peur. Il ne se sécurise pas par la privatisation de la guerre. Et il ne se dirige pas à coups de communications martiales pendant que la population vit sous le joug de groupes armés ou de soldats sans uniforme.

La Centrafrique mérite une armée républicaine, une autorité souveraine, une politique de sécurité nationale. Elle mérite un État, pas une façade.

À quelques mois des élections, le moment est venu de choisir : continuer à faire semblant de gouverner ou prendre enfin la mesure des responsabilités d’un État digne de ce nom.


Dans un pays où l’État délègue sa sécurité, c’est le chaos qui gouverne.

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