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Ce lundi, la Cour Pénale Spéciale (CPS) de Bangui a repris les débats contradictoires dans l’affaire Ndele2, portant sur les violences du 6 mars 2020 au marché de Ndele. L’audience s’est appuyée sur les témoignages de deux témoins clés : Aliou, un habitant de Ndele, et Ndjamandji Abdoulaye, chef du village Lemena. Compte rendu d’audience.

Les tensions à Ndele remontent à une semaine avant les événements tragiques. Un rebelle du nom d’Abakar Balamane avait tenté de démanteler une barrière en pleine ville, déclenchant une altercation avec des éléments Goula qui s’y opposaient. La confrontation a dégénéré lorsque Balamane a ouvert le feu, tuant un Goula.

Face à ce meurtre, la communauté Goula a exigé que l’auteur soit traduit en justice. Le sultan-maire de Ndele a alors rappelé l’existence d’un comité de paix et précisé que la MINUSCA devait prendre le relais. Insatisfaits et impatients, certains éléments Goula ont décidé d’agir eux-mêmes. Le 6 mars 2020, ils ont attaqué le marché de Ndele, causant plusieurs morts et semant la terreur.

« Un premier témoin sous pression »

Lors de l’audience, le substitut du procureur a insisté sur l’implication des accusés, s’appuyant sur le témoignage d’Aliou, rescapé des attaques. Ce dernier a confirmé que l’origine des violences résidait dans l’assassinat d’un Goula sur une barrière en ville.

La défense, représentée par Me Joachim Pessinam, avocat de Hamat Hissene Abakar, a contre-interrogé Aliou, cherchant à établir si son client était directement impliqué. A-t-il vu Abakar tirer sur les civils ? Était-il présent au moment des faits ?

Aliou a reconnu ne pas avoir vu Hissene Abakar tirer, mais a affirmé qu’il dirigeait les soldats responsables des attaques. Il a ajouté qu’il était lui-même présent sur les lieux et avait été blessé à la cheville.

« Des preuves accablantes contre les accusés »

Le parquet a ensuite présenté plusieurs éléments visant à démontrer que les accusés ont bien participé aux violences. Selon le substitut du procureur, Adam Mockhtar et d’autres accusés ne pouvaient agir seuls, insinuant l’existence d’une coordination plus large derrière ces attaques coordonné par Abdoulaye Hissene, fondateur du FPRC.

Le nom d’Ahamat Hissene, alias Encadreur, a également été évoqué. À la question de savoir s’il connaissait ce dernier, le témoin Aliou a répondu qu’il ne l’avait jamais rencontré directement, mais qu’il était une figure influente à Ndele.

« Un second témoignage renforce les accusations »

Le chef du village Ndjamandji Abdoulaye, deuxième témoin entendu, a renforcé les accusations. Selon lui, les assaillants ont attaqué des villages environnants et ciblé spécifiquement les Roungas, une communauté ethnique locale. Il a décrit la situation comme une tentative de génocide, expliquant que les Roungas étaient traqués et tués.

Même le préfet de Ndele n’a pas été épargné, a-t-il ajouté. Celui-ci aurait été arrêté, passé à tabac et sa maison incendiée. Il a également évoqué neuf attaques successives ayant visé plusieurs villages environnants, comme Gosbeda, Lemena et Ndele Centre.

À cette époque, l’État était quasi absent, et les groupes armés faisaient la loi, rendant son autorité de chef de village inutile.

« La défense dénonce un acharnement »

Face à ces accusations, la défense a contre-attaqué, dénonçant une tentative d’acharnement contre les accusés. Les avocats ont remis en cause l’exactitude des dates et des lieux d’attaque mentionnés par les témoins. L’un des accusés, Ada, a été décrit comme une figure centrale de la répression, imposant sa loi à Ndele. Même au petit marché situé près du camp de la MINUSCA, il menaçait ouvertement les civils, selon les témoignages recueillis.

Les débats se poursuivent devant la CPS, alors que la défense tente de minimiser l’implication de ses clients et que l’accusation cherche à démontrer leur responsabilité dans les massacres de Ndele en mars 2020. La Cour devra trancher sur ces lourdes accusations qui pourraient conduire à des condamnations exemplaires dans les jours à venir.

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