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Dans un contexte de crise politique persistante, l’exclusion de la médiation internationale par le pouvoir de Bangui dans le dialogue en cours avec l’opposition notamment le BRDC, soulève des inquiétudes sur l’avenir de ses assises.
 À l’heure où la République centrafricaine tente de refermer les plaies d’une décennie de guerre fratricide, les espoirs de réconciliation nationale et de refondation institutionnelle, semblent une fois de plus compromis. Malgré l’organisation d’un dialogue politique dit « républicain » en cours, le pouvoir en place, sous la présidence de Faustin-Archange Touadéra, fait face à une critique croissante pour avoir systématiquement évincé l’Opposition réelle et ignoré les appels à une médiation internationale impartiale.

L’exclusion comme stratégie politique

Depuis la conférence des donateurs à Bruxelles en 2016, qui visait à mobiliser plus de 3 000 milliards de dollars pour la reconstruction du pays, l’élan d’unité nationale s’est étiolé. Le régime a progressivement instauré une politique d’exclusion : société civile marginalisée, opposants politiques discrédités, et dialogue national vidé de sa substance par la sélection de participants complaisants.

Le point de rupture fut la signature de l’Accord de Khartoum, perçu par beaucoup comme une manœuvre du pouvoir pour légitimer certains groupes armés et éviter de traiter avec l’Opposition démocratique légitime. L’adoption contestée d’une nouvelle constitution par voie référendaire et les ambitions affichées d’un troisième mandat, ont accentué les tensions internes.

Face à la pression grandissante pour un dialogue politique crédible, l’opposition et plusieurs organisations internationales ont plaidé pour une médiation internationale. Mais le pouvoir de Bangui s’y oppose fermement. Selon les observateurs, cette réticence repose sur trois raisons principales :

Contrôle total du processus : Le gouvernement souhaite maîtriser le dialogue de bout en bout du choix des thèmes aux participants, en passant par le calendrier et le lieu. Une médiation indépendante limiterait cette mainmise.

Crainte d’un arbitrage impartial : Le régime redoute qu’un médiateur étranger favorise des compromis au détriment de son maintien au pouvoir. L’Opposition démocratique pourrait bénéficier d’une meilleure visibilité sur la scène nationale et internationale.

Souveraineté en question : Enfin, le pouvoir invoque le spectre d’une ingérence étrangère. Pour Touadéra et son entourage, la médiation internationale représenterait une perte d’indépendance et un risque d’imposition de décisions extérieures.

Les vertus ignorées de la médiation

Pourtant, la médiation internationale ne manque pas d’atouts. Elle est garante de transparence, de neutralité et d’une crédibilité accrue du processus. Elle permet aussi de faire pression pour le respect des normes démocratiques internationales : non-violation des constitutions, respect de l’alternance au pouvoir, et rejet des manipulations institutionnelles.

En refusant cette option, le pouvoir laisse planer le doute sur ses véritables intentions. Comme le souligne Bernard Selemby Doudou, juriste et administrateur électoral : « Refuser la médiation internationale suppose que le pouvoir de Bangui a des agendas cachés qu’il veut imposer. »

L’auteur va jusqu’à lancer une mise en garde : en Afrique sub-saharienne, le troisième mandat présidentiel est souvent plus meurtrier qu’un coup d’État. Ce parallèle illustre l’ampleur du danger : persister dans cette voie pourrait mener à une crise grave, voire à un soulèvement populaire.

À un moment charnière de son histoire, le Centrafrique se trouve à la croisée des chemins. En refusant la médiation internationale, le pouvoir de Bangui hypothèque la réussite d’un dialogue politique sincère et inclusif. La stabilité du pays est en jeu, et seule une ouverture réelle vers une médiation crédible pourrait ramener la confiance entre les acteurs politiques et éviter le retour au chaos.

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