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L’aube se lève à peine sur le marché Petevo lorsque les bulldozers de la mairie de Bangui entrent en action. En quelques heures, des dizaines de boutiques en tôle et le local de l’ONG UTEFAJEDE sont réduits en tas de débris. Les commerçants, stupéfaits, assistent impuissants à la destruction de leurs lieux de travail.

Sur place, l’atmosphère est lourde. Des groupes de commerçants se forment, entre indignation et désarroi. Anicet, un riverain de longue date, ne cache pas sa frustration : « Nous avons été pris de court ! Personne ne nous a prévenus officiellement. Ce marché, c’est notre moyen de survie. Aujourd’hui, on nous met à la rue sans aucune alternative. C’est injuste ! »

Comme lui, de nombreux vendeurs s’interrogent sur leur avenir. Certains fouillent les gravats, espérant récupérer ce qu’ils peuvent. D’autres, assis sur des cartons, semblent perdus, observant le travail des machines qui continuent leur besogne sous le regard des agents municipaux et des forces de l’ordre.

« Une réhabilitation nécessaire selon la mairie »

De son côté, la municipalité assume son choix et justifie l’opération. Un responsable de la mairie, sous couvert d’anonymat, nous explique : « Le marché Petevo appartient à la ville de Bangui. Il était devenu chaotique, avec des installations anarchiques et insalubres. Nous devons moderniser cet espace pour offrir de meilleures conditions aux commerçants et aux clients. »

Selon la mairie, cette restructuration vise à mettre le marché aux normes internationales, avec des espaces organisés et des infrastructures modernes. L’inauguration officielle est prévue pour le samedi 1er février prochain.

Eveline, une vendeuse de fruits et légumes installée à proximité du marché, perçoit cette transformation comme une opportunité : « C’est une bonne chose que le marché soit restructuré. Avant, c’était le désordre, il n’y avait pas de place pour circuler. Si la mairie construit quelque chose de moderne, cela peut attirer plus de clients et améliorer nos conditions de travail. »

Mais cette vision optimiste n’est pas partagée par tous. Pour les déguerpis, l’urgence est de retrouver un espace où continuer leurs activités. Beaucoup se disent prêts à coopérer, mais réclament un accompagnement de la mairie.

Malgré la tension ambiante, la mairie se veut fermer et lance un avertissement aux derniers occupants illégaux : « Nous demandons à ceux qui sont encore sur place de libérer les lieux avant le 1er février. Ce projet doit avancer, et nous ne reculerons pas. »

Face à cet ultimatum, certains commerçants tentent de négocier des délais, tandis que d’autres envisagent déjà de s’installer dans d’autres marchés de la capitale.

Alors que le bruit des bulldozers s’estompe, laissant derrière lui un paysage de ruines, une question demeure : la mairie tiendra-t-elle ses promesses d’un marché moderne et accessible à tous ? Ou bien ce déguerpissement ne fera-t-il qu’accentuer la précarité de ceux qui en vivent ?

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