
Des crises sécuritaires persistantes, des rivalités régionales de plus en plus exacerbées, et une multiplication des conflits politiques fragilisent l’unité de l’Afrique et retardent son développement.
L’Afrique, un continent marqué par une histoire de luttes pour l’indépendance et l’unité, se retrouve aujourd’hui confrontée à des défis de taille qui menacent cette aspiration commune.
L’Union Africaine, pourtant conçue pour être le fer de lance de la solidarité et de la coopération continentale, peine à imposer son autorité et à apporter des solutions efficaces.
Les tensions entre le Rwanda et la RDC : Les limites du pouvoir de l’Union Africaine
Le conflit entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo (RDC) est un exemple frappant de la manière dont des tensions géopolitiques peuvent déstabiliser toute une région. Accusé par la RDC de soutenir les rebelles du M23 opérant dans l’est du pays, le Rwanda se retrouve dans une position diplomatique et militaire délicate.
La prise de certaines zones stratégiques par les rebelles, dont la ville de Goma, a provoqué une escalade des tensions, aboutissant à la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays. Ce conflit souligne l’incapacité de l’Union Africaine à résoudre efficacement les différends entre États voisins, et la crise humanitaire qu’il engendre peut affecter toute la région des Grands Lacs.
La communauté internationale, représentée par l’ONU et l’Union Africaine, se contente de condamnations, mais sans mesures concrètes pour mettre fin à la violence. Le soutien incontestable du Rwanda au M23, sur le fond d’exploitations des ressources minières du Congo, est perçu par certains comme une tentative de renforcer son influence dans une région stratégique, mais cette ingérence ne fait qu’alimenter la fragmentation régionale et exacerber la méfiance entre États africains.
Le Soudan : un pays au bord du chaos humanitaire
À l’autre bout du continent, le Soudan traverse une crise politique et militaire sans précédent. Depuis le renversement d’Omar al-Bashir en 2019, le pays est plongé dans une guerre civile entre factions militaires rivales des deux Généraux. La situation au Soudan a des répercussions bien au-delà de ses frontières, menaçant la stabilité de toute la région de la Corne de l’Afrique. L’instabilité politique et les violences interethniques ont contraint des millions de Soudanais à fuir leur pays, créant une crise humanitaire majeure.
L’incapacité de l’Union Africaine à prendre des mesures de médiation efficaces face à cette crise souligne encore une fois la faiblesse des mécanismes de gouvernance du continent. L’UA a du mal à imposer un ordre durable face à un tel niveau de violence interne et d’interventions extérieures.
Les belligérants sont finalement obligés de se tourner vers les puissances occidentales pour des intérêts géostratégiques. L’Afrique a-t-elle tourné le dos au Soudan ?
La CEDEAO et l’AES : Des solutions parfois inefficaces
L’Afrique de l’Ouest, une région historiquement marquée par des tensions politiques et des conflits internes, illustre également les limites de la solidarité africaine. L’exemple de la CEDEAO (Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest) face à des crises récurrentes, comme celles au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, montre une organisation parfois divisée, avec des interventions militaires et diplomatiques qui ne parviennent pas toujours à stabiliser durablement ces pays.
L’Assemblée des États membres de la CEDEAO (AES), censée coordonner les actions pour une stabilité régionale, peine à répondre aux défis complexes de la sécurité, et ses actions sont souvent perçues comme inefficaces ou trop tardives. Les tensions entre certains pays de l’UA, et leurs divergences d’intérêts, ont conduit à une gestion chaotique des crises.
Le Mali, Niger et Burkina Faso, se sentant marginalisés au sein de la CEDEAO, ont finalement décidé de claquer la porte. Doit-on s’attendre à un autre départ au sein de cette Institution jadis porteur d’espoir d’un commun destin des peuples de cette région ?
L’Union Africaine : une organisation phare en crise
Qui pour succéder au diplomate tchadien, Moussa Fakir Mahamat, pour relever les nombreux défis du continent ?
Malgré ses objectifs ambitieux de promotion de l’intégration africaine, de paix et de sécurité, l’Union Africaine (UA) fait face à une réalité plus complexe. Chargée de coordonner les efforts de paix et de sécurité à travers le continent, l’UA n’a pas toujours été en mesure de répondre efficacement aux crises multiples qui déstabilisent l’Afrique.
Les membres de l’Union Africaine, souvent tiraillés par leurs propres intérêts nationaux, peinent à adopter une ligne commune. L’inefficacité de l’UA dans la gestion des conflits au Soudan, en Libye, en Afrique de l’ouest ou encore dans la région des Grands Lacs, montre une organisation de plus en plus fragmentée, qui ne parvient pas à imposer une autorité continentale face aux crises sécuritaires.
De plus, l’UA souffre d’un manque de moyens financiers et logistiques pour mener des opérations de maintien de la paix efficaces sur le terrain, une dépendance vis-à-vis des aides extérieures qui fragilise son indépendance et son pouvoir décisionnel.
« L’unité en péril »
L’unité de l’Afrique est aujourd’hui plus que jamais en péril. La multiplication des conflits internes, des ingérences étrangères, et les divisions politiques rendent difficile la réalisation des objectifs de paix, de sécurité et de développement durable prônés par les fondateurs de l’Union Africaine. Alors que des solutions régionales sont proposées par des organisations comme la CEDEAO, leur efficacité est souvent compromise par des divergences d’intérêts.
L’Afrique doit repenser ses mécanismes de gouvernance et renforcer la solidarité entre ses États. Si l’Union Africaine veut préserver l’unité du continent et favoriser la coopération, il est crucial qu’elle mette en place des réformes profondes prenant en compte les réelles aspirations de sa jeunesse, qu’elle renforce ses capacités de médiation, et qu’elle parvienne à surmonter les clivages internes qui continuent de diviser les pays africains. Sinon, l’unité africaine risque de devenir un idéal lointain, menacé par des crises sécuritaires et des rivalités politiques sans fin.