
Il est monté sur la loggia de Saint-Pierre dans un moment où l’Église, le monde, et surtout l’Afrique, avaient désespérément besoin d’une voix morale. Léon XIV, ancien cardinal Robert Francis Prevost, premier pape américain de l’histoire, n’aura pas le luxe d’un pontificat tranquille. Car tandis que la fumée blanche s’élevait au-dessus du Vatican, une ombre lourde planait sur la planète : le retour de Donald J. Trump à la Maison-Blanche.
À peine réinstallé, le président américain déploie une politique étrangère musclée, centrée sur l’Amérique seule. Le financement de programmes de développement en Afrique est gelé. Les aides médicales internationales sont réduites à leur plus simple expression. Et les diplomaties africaines, de Dakar à Nairobi, se retrouvent orphelines d’un partenaire devenu indifférent.
Dans cette ère de replis, qui parlera pour les invisibles ? L’Église catholique, profondément enracinée en Afrique, conserve une légitimité spirituelle et humaine que la géopolitique ignore trop souvent. Hôpitaux, écoles, paroisses, œuvres sociales : l’Église est présente là où les États désertent.
Léon XIV hérite donc d’un rôle bien au-delà du dogme : il devient un acteur moral international, capable de dire ce que d’autres n’osent plus dire. Et face à Donald Trump, il est peut-être l’un des rares à pouvoir être écouté sans être méprisé.
Un Pape Américain, mais Universel
Léon XIV partage avec Trump une langue, une culture, certains codes. Mais là s’arrêtent les ressemblances. Là où le Président construit des murs, le Pape est appelé à bâtir des ponts. Il n’est pas le pape de l’Amérique, mais le pasteur du monde.
S’il veut que son pontificat soit fidèle à la mission du Christ, Léon XIV devra rapidement hausser le ton. Exiger que l’Afrique ne soit plus marginalisée. Interpeller le pouvoir américain au nom d’une foi qui ne se contente pas de prières, mais se traduit en justice concrète.
Le continent africain ne tend pas la main pour mendier. Il réclame qu’on l’écoute, qu’on le traite avec dignité, qu’on respecte ses peuples et ses enjeux. Une visite du pape au cœur du continent à Kinshasa, Abidjan ou Juba serait un signal clair : l’Afrique est au cœur de l’Église, et donc au cœur du monde.
Un pontificat prophétique
Léon XIV n’a pas choisi le tumulte de ce moment. Mais le moment l’a choisi, lui. Il devra être le pape du dialogue, certes, mais aussi de la fermeté morale. S’opposer, sans haine, à un président qui brandit la foi tout en piétinant ses exigences.
L’Église ne peut pas se taire quand le sort de millions dépend d’une décision politique. Et si une main tendue peut adoucir le cœur de Trump, elle devra être portée par un pape convaincu que la vérité ne se négocie pas.
En ce mois de mai 2025, l’Église universelle entame un nouveau chapitre avec Léon XIV. Ce chapitre ne pourra être neutre. Soit il sera missionnaire, engagé et lucide, soit il sera complice par silence.
Et l’Histoire ne retiendra pas seulement ce que ce pape aura dit. Mais à qui il aura eu le courage de le dire.