
Le Projet d’Appui au Retour et à l’Intégration des Personnes Déplacées et Réfugiés (PARET), une initiative phare soutenue par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR), traverse une période de turbulences en Centrafrique. Lancé en 2016, ce programme a pour objectif principal de faciliter le retour des déplacés internes et des réfugiés centrafricains, victimes de conflits violents et de crises humanitaires.
Après près de neuf ans de fonctionnement, des signes préoccupants de dysfonctionnement et de mauvaise gestion commencent à se manifester au sein de ce projet pourtant intégrateur pour le retour des déplacés et refugies en Centrafrique.
Le 11 février 2025, le président Faustin Archange Touadéra a inauguré la cellule de suivi et d’exécution des programmes publics, marquant une tentative de redressement dans la gestion des projets nationaux. Cette initiative arrive dans un contexte où le PARET peine à remplir ses objectifs, notamment en raison de problèmes structurels et organisationnels qui nuisent à son efficacité.
Le PARET, financé par l’UNHCR, a toujours été confronté à une gestion complexe des ressources humaines. Le personnel du projet, composé majoritairement de contractuels, a suscité plusieurs critiques, notamment de la part de l’UNHCR. En décembre 2020, dans une lettre adressée au gouvernement centrafricain, l’UNHCR avait exprimé ses préoccupations, suggérant que le personnel contractuel soit remplacé par des fonctionnaires. L’UNHCR proposait également la mise en place d’un plan de renforcement des capacités des agents de l’État pour assurer une continuité et une durabilité du projet à long terme.
Cet appel à une réforme du personnel n’a cependant pas trouvé une réponse concrète, ce qui a contribué à une gestion inefficace du projet, en particulier en ce qui concerne le suivi des déplacés internes et le retour des réfugiés.
« La nouvelle ministre et les remaniements au sein du PARET »
L’arrivée de Lina Josiane Béma-Kassoui à la tête du ministère de l’Action Humanitaire, de la Solidarité et de la Réconciliation Nationale, en mars 2024, a marqué un tournant dans la gestion du PARET. Elle a immédiatement procédé à un remaniement au sein du personnel du projet. La ministre a décidé de relever l’intégralité du staff, mettant en place une série de tests de recrutement pour s’assurer que le PARET soit dirigé par des personnes compétentes et motivées.
C’est ainsi qu’en 2025, la nomination de Sonia Amedi Watrin à la tête de la coordination du PARET a fait grand bruit. Sonia Amedi Watrin, ancienne cheffe de Centre du projet, avait été licenciée en 2022 pour non-respect des engagements contractuels. Sa réintégration dans le projet, accompagnée d’une compensation financière de plus de 5 millions de francs CFA, a fait l’objet d’un débat intense. En dépit de ses démêlés judiciaires avec le PARET, elle a été réintégrée et nommée à un poste de grande responsabilité.
La réintégration de Sonia Amedi Watrin a été perçue par certains observateurs comme un retour triomphal pour celle qui avait entamé une action en justice contre le projet après son licenciement. En 2022, la justice centrafricaine avait ordonné le paiement de près de 6 millions de francs CFA à Watrin en raison de la rupture de son contrat de travail. Malgré ces tensions et le contexte juridique complexe, Watrin a été rétablie dans ses fonctions, ce qui a soulevé des questions sur les liens qui unissent la nouvelle ministre Lina Josiane Béma-Kassoui et cette responsable.
Les soupçons d’un conflit d’intérêts ne se sont pas fait attendre. En effet, après sa réintégration, Watrin a rapidement retrouvé son poste de cheffe des opérations de retour, avant de se voir propulser à la coordination du projet. Plusieurs questions se posent : comment une personne ayant eu un passé difficile avec le projet, et ayant même contesté sa gestion, peut-elle désormais être vue comme la solution à ses problèmes ?
« Les enjeux financiers et stratégiques du PARET »
En plus des questions de gestion humaine, le PARET est confronté à une crise financière de plus en plus profonde. Le projet peine à obtenir des financements suffisants et à gérer les fonds alloués de manière transparente. La ministre Béma-Kassoui et Sonia Amedi Watrin doivent désormais faire face à un double défi : rétablir la confiance des partenaires internationaux, notamment l’UNHCR, et gérer un budget de plus en plus restreint dans un environnement économique difficile.
Les attentes sont grandes concernant les stratégies que la nouvelle équipe de direction mettra en place pour répondre à ces défis. La crise financière actuelle du PARET pourrait avoir des conséquences graves sur sa mission humanitaire, notamment sur la prise en charge des déplacés internes et des réfugiés, ainsi que sur la reconstruction des zones dévastées par les conflits.
Le PARET, bien qu’essentiel pour la stabilité et la reconstruction de la Centrafrique, est plongé dans une crise de gestion majeure. Les tensions internes, les problèmes de gouvernance et la crise financière mettent en péril l’avenir du projet. La nomination de Sonia Amedi Watrin, malgré ses précédentes controverses, laisse entrevoir une volonté de relance, mais la question demeure : les réformes annoncées permettront-elles de redresser la barre ?
Il est impératif que le gouvernement centrafricain, soutenu par ses partenaires internationaux, mette en place des solutions concrètes pour assurer la réussite de ce projet vital pour les milliers de citoyens centrafricains toujours déplacés. La réussite du PARET ne dépendra pas seulement de la volonté politique mais aussi de la gestion rigoureuse des ressources et de l’engagement de toutes les parties prenantes.