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Depuis le coup d’État du 5 septembre 2021 qui a renversé Alpha Condé, la Guinée traverse une période de transition qui semble s’éterniser, sans fin claire en vue.

Le colonel Mamadi Doumbouya, à la tête du pays, avait promis un retour à l’ordre constitutionnel dans un délai de 18 mois, mais à ce jour, cette promesse semble bien loin d’être tenue. Cette transition prolongée suscite de nombreuses interrogations, à la fois au sein de la population guinéenne et sur la scène internationale.

Quelles sont les raisons de ce rallongement ? Dans le contexte politique et sécuritaire actuel, il semble que la junte militaire justifie sa prolongation par la nécessité de réformer en profondeur les institutions du pays, de restaurer l’ordre social et de créer les conditions d’un environnement électoral apaisé. Certes, ces objectifs sont louables, mais à quel prix ? Le temps semble s’étirer indéfiniment, et chaque mois supplémentaire sans retour à la démocratie pèse lourdement sur la confiance des Guinéens en leurs dirigeants.

Dans l’espace sous régional, l’extension de la période de transition semble devenir une tendance. Dans l’Alliance des États du Sahel (AES), de nombreuses juntes militaires soutenues par la Russie ont opté pour une prolongation de leur pouvoir, au-delà des délais fixés. Elles invoquent souvent des arguments similaires : la nécessité de « stabiliser » le pays, de « lutter contre le terrorisme » ou de rétablir « l’unité nationale ». Mais ces justifications, qui semblent être de plus en plus utilisées par les régimes militaires, ne sont-elles pas en réalité une manière d’empêcher un retour à des élections démocratiques ?

Cependant, dans un contexte où d’autres juntes militaires de la sous-région, comme en Guinée, ont opté pour une prolongation indéfinie de leur transition, le cas du Gabon sous le Général Oligui Nguema pourrait être vu comme une exception, mais aussi comme un test de la volonté réelle de rétablir la légitimité démocratique dans un environnement où les attentes de réformes sont croissantes.

« L’opposition vent debout »

En Guinée, l’opposition ne se laisse pas faire. Bien qu’elle accepte la nécessité d’une transition, elle réclame un agenda clair pour la fin de cette période. Les partis politiques et les organisations de la société civile dénoncent un manque de transparence et une absence de calendrier précis pour les élections, estimant que la Guinée reste dans une spirale de gestion autoritaire qui ne permet pas une sortie de crise rapide.

Cette frustration est d’autant plus forte que la junte guinéenne, comme d’autres régimes militaires de la sous-région, semble refuser d’engager un dialogue véritable avec l’opposition, s’accrochant à son pouvoir sans réel projet de transition démocratique.

Les Guinéens sont en droit d’exiger une réponse claire : à quelle échéance cette transition prendra-t-elle fin ? Le Colonel Mamadou Doumbouya, désormais à la tête de la Guinée, pourra-t-il offrir un retour à la démocratie tout en consolidant son pouvoir militaire ? Où va-t-il choisir de prolonger indéfiniment son mandat, comme l’ont fait d’autres chefs militaires dans des pays voisins ?

« Une histoire qui pourrait se répéter ? »

La situation de la Guinée n’est pas sans rappeler celle d’autres pays qui ont connu des transitions interminables. En Afrique, l’histoire de régimes militaires prolongés ou de transitions éternelles est bien documentée. Les exemples sont nombreux où les promesses de retour à la démocratie ont été repoussées indéfiniment sous prétexte de « stabilité » et de « réformes nécessaires », tout en maintenant les militaires au pouvoir.

Dans ce contexte, la question qui se pose est la suivante : la Guinée risque-t-elle de suivre cette même trajectoire ? Le pays, déjà ébranlé par des crises politiques successives, est-il destiné à vivre un éternel cycle de transitions inachevées, où les régimes militaires s’installent durablement, au détriment de la volonté populaire ?

Aujourd’hui, la Guinée se trouve à un carrefour. Le pays a besoin d’un calendrier clair, de réformes démocratiques sincères et d’un véritable retour à l’ordre constitutionnel. Les prolongations de transition, au nom de la stabilité, doivent cesser de masquer des ambitions de pouvoir à long terme. La Guinée, proie à la crise depuis plusieurs années, se doit de sortir de ce cercle vicieux et de se tourner enfin vers un avenir démocratique durable.

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