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Depuis l’intensification des combats entre le M23, soutenu par le Rwanda, et l’armée congolaise, la République centrafricaine se retrouve dans une position délicate. Liée à la fois à Kigali et à Kinshasa par divers accords, elle tente de préserver une neutralité difficile à maintenir. L’analyste politique Paul-Crescent Beninga estime que la RCA est « entre le marteau et l’enclume ».

Ces dernières années, le Rwanda a renforcé sa présence en RCA, notamment à travers des partenariats économiques et sécuritaires. De nombreux Rwandais vivent en Centrafrique, principalement à Bangui, et certains occupent des postes clés dans l’administration et la sécurité du pays. Cette influence croissante s’est matérialisée par plusieurs accords bilatéraux, faisant du Rwanda un acteur incontournable en RCA.

Cependant, la montée des tensions dans l’est de la RDC place Bangui dans une situation complexe. La RCA partage une frontière avec la RDC et entretient également des relations militaires avec Kinshasa. L’attaque de Goma par le M23, largement attribuée au soutien du Rwanda, a ravivé les tensions régionales et mis la RCA dans une position inconfortable.

« Un retournement de situation défavorable à Kigali ? »

Paul-Crescent Beninga souligne que la stratégie d’expansion du Rwanda repose sur une politique de puissance visant à pallier son manque de ressources naturelles et humaines. Selon lui, Kigali cherche à compenser ce déficit en étendant son influence sur des territoires stratégiques comme le Nord-Kivu.

Toutefois, cette stratégie pourrait se retourner contre Paul Kagame. L’implication croissante du Rwanda dans le conflit congolais a provoqué des réactions internationales. Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a récemment menacé de déclarer la guerre si un soldat sud-africain engagé en RDC était touché. Cette position pourrait isoler Kigali sur la scène diplomatique et compliquer sa gestion du conflit.

Face à cette crise, la RCA doit choisir entre maintenir sa neutralité ou prendre position, ce qui pourrait avoir des conséquences sur ses relations avec ses partenaires : « Toute action de la République centrafricaine est scrutée », avertit Beninga, soulignant que Kigali pourrait exercer une pression plus forte sur Bangui que Kinshasa.

Selon lui, la RCA doit envisager un repositionnement géostratégique, compte tenu de l’influence rwandaise dans le pays : « Le Rwanda connaît certaines réalités du pays mieux que les Centrafricains eux-mêmes », ajoute-t-il, mettant en garde contre une éventuelle instrumentalisation de la RCA par Kigali.

Jusqu’à présent, les autorités centrafricaines n’ont pas pris de position officielle sur la crise. Une stratégie qui leur permet de gagner du temps, mais qui pourrait devenir intenable si le conflit s’enlise. Reste à savoir si Bangui pourra réellement conserver cette neutralité ou si elle sera contrainte, tôt ou tard, de choisir un camp.

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