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Dimanche 27 avril 2025, au quartier Castors dans le 3ᵉ arrondissement de Bangui, une scène choquante s’est déroulée sous les yeux impuissants des habitants : un conducteur de triporteur, poursuivi par des éléments de la Compagnie Nationale de Sécurité (CNS), a terminé sa course dans un ravin. Grièvement blessé, il a été abandonné par ses poursuivants, sans secours, sans assistance.

Que s’est-il passé ? Une simple tentative d’interpellation qui dégénère en chasse à l’homme, comme trop souvent dans notre pays. Au lieu d’agir avec discernement et mesure, les agents ont préféré l’intimidation, la violence, la force brute. Résultat : une vie brisée, des blessures physiques, mais surtout, une nouvelle blessure morale infligée à une population déjà exsangue.

Depuis quand une interpellation justifie-t-elle une course-poursuite à travers des quartiers populaires, mettant en danger la vie du conducteur, des passants, des enfants qui jouent dans la rue ? Depuis quand un « ordre d’arrêt » se transforme-t-il en feu vert pour la mort ? Où sont passées les missions premières de la police : protéger, sécuriser, rassurer ?

La vérité est crue, brutale : notre police s’est dévoyée. Loin d’être un bouclier pour les citoyens, elle est devenue une arme contre eux. Loin d’incarner l’autorité légitime, elle incarne la peur, l’arbitraire, la violence gratuite. Chaque patrouille devient un risque, chaque contrôle un danger potentiel. Et toujours, le même scénario : l’impunité totale des agents fautifs, la banalisation des abus, le silence assourdissant des autorités.

Nous ne pouvons plus accepter que nos quartiers se transforment en zones de non-droit où la force brute est la seule loi. Nous ne pouvons plus tolérer que des citoyens soient traqués, blessés, humiliés, parfois tués, sous prétexte de maintenir « l’ordre ». Quel ordre ? Celui de la terreur ? Celui de l’injustice ? Celui qui fait taire les pauvres et protège les puissants ?

Chaque jour de silence, chaque jour d’impunité, chaque jour d’indifférence, construit une bombe sociale à retardement. La confiance entre la population et ses forces de sécurité est brisée, et sans cette confiance, aucun État ne peut se prétendre viable.

Il est temps d’exiger des comptes. Il est temps de réformer en profondeur nos forces de sécurité, de leur imposer des règles strictes, un respect absolu des droits humains, et une reddition systématique devant la justice pour tout abus. Il est temps de mettre fin à cette culture de la brutalité qui gangrène notre société.

À Castors, ce dimanche, ce n’est pas seulement un conducteur de triporteur qui a été précipité dans un ravin. C’est l’image de tout un pays qui s’enfonce dans l’injustice et l’indifférence. Mais nous avons encore le pouvoir de dire non. De refuser l’inacceptable. D’exiger la fin de la barbarie d’État.

Parce qu’aucun progrès, aucune paix, aucune stabilité n’est possible dans un pays où la police devient une menace plus grande que le crime.

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