
Une affaire de succession prend une tournure judiciaire tendue dans le 8ᵉ arrondissement de Bangui, opposant les enfants du feu Pasteur Grégoire MBOLIYOU à leur marâtre, Mme Anne Victoire YAKOSSOBE, magistrate de profession et juge a la Cour des Comptes. Au centre de la discorde : la propriété familiale située près du Pont Ngoubagara, que les enfants accusent Mme YAKOSSOBE d’occuper illégalement malgré les dernières volontés claires de leur père consignées dans un testament.
Décédé le 27 novembre 2023, le Pasteur Grégoire MBOLIYOU avait rédigé en mai 2005 un testament dans lequel il répartissait ses biens entre ses enfants légitimes. Selon ce document dont la rédaction d’Afrique en Plus a pu consulter une copie, deux villas sont léguées aux enfants issus de son union légitime : la « Villa Freddy », située en face de la Paroisse Notre-Dame d’Afrique, et une autre villa située à proximité du Pont Ngoubagara, dans le 8ᵉ arrondissement de Bangui.
Les héritiers désignés comprennent notamment Irène Viviane BANOUKEPA, OUAMBO II Mack Gregor, ANIYESSI Adeline Mathy, MBOLIYOU Carine, OUAMBO III Marius, OUAMBO VI MBOLIYOU Cédric, MBOLIYOU Délia, MBOLIYOU Marie Thérèse Line, Freddy Boris Yann, Willy Lionnel, Djamal Farel, Rodrigue Sifort, Marie Paule et Sendepa MBOLIYOU OUAMBITO tous reconnus comme enfants du pasteur issus de son union légitime.
Occupation contestée et refus d’évacuer les lieux
Depuis le décès du pasteur, Mme Anne Victoire YAKOSSOBE, qui n’était ni épouse légalement mariée ni citée dans le testament, occupe la villa située près du Pont Ngoubagara. Les enfants affirment lui avoir adressé une sommation de libérer les lieux dans un délai de trois mois, sans obtenir de réponse favorable.
Selon Marie Paule MBOLIYOU, la démarche des héritiers vise à « mettre la maison en location afin de générer des revenus à répartir entre les ayants droit pour faire face à leurs charges familiales. » Une intention contrecarrée par l’occupation persistante de la maison par Mme YAKOSSOBE.
Face au refus de coopérer, les enfants MBOLIYOU ont saisi la justice. Une ordonnance d’assignation à comparaitre a été émise le 2 juin 2025, convoquant les parties devant le Tribunal de Grande Instance de Bangui à l’audience de référé fixée au 4 juin 2025 à 13 heures.
La procédure est portée par Rodrigue Sifort MBOLIYOU-OUAMBO, héritier résidant aux États-Unis, représentant légal de la famille dans ce litige. Mais les plaignants dénoncent déjà des tentatives de manipulation du dossier. Ils affirment que Mme YAKOSSOBE userait de son statut de magistrate pour faire pression sur les juridictions compétentes, ralentir la procédure et modifier des pièces du dossier. Lors de la première audience, sur les 4 avocats de l’accusé, trois ont répondu devant la cour et ont fait renvoyer le dossier pour absence d’un des leurs. Un fait qualifié de stratégie pour ralentir l’affaire selon les enfants MBOLIYOU.
« Des preuves ont été détournées, des reports orchestrés, et des messages d’intimidation circulent régulièrement », témoignent plusieurs membres de la fratrie MBOLIYOU. Certains affirment même avoir reçu des menaces voilées de la part de demi-frères, ce qui tend davantage les relations familiales.
Le poids de la fonction, le silence de la justice
La principale intéressée, Mme Anne Victoire YAKOSSOBE, n’a pour l’instant fait aucune déclaration publique. Toutefois, selon les enfants du défunt, elle aurait laissé entendre qu’« en tant que magistrate, rien ne pourrait être fait contre elle », renforçant le sentiment d’injustice exprimé par les héritiers.
L’affaire soulève une question fondamentale : un magistrat peut-il se prévaloir de son statut pour faire obstruction à l’application d’un testament en bonne et due forme ? Les enfants MBOLIYOU appellent à une justice impartiale et au respect strict de la loi successorale. Contacter, Dame Anne Victoire YAKOSSOBE indique qu’elle n’a rien à dire mais attend seulement la conclusion de la justice dans l’affaire.
Dans un contexte où les litiges fonciers sont fréquents en République centrafricaine, cette affaire attire l’attention d’observateurs et d’associations de défense des droits civiques, qui craignent une instrumentalisation de la justice au profit de quelques privilégiés.
Pour l’heure, la procédure judiciaire suit son cours. Les héritiers MBOLIYOU maintiennent leur volonté de récupérer la maison familiale conformément aux dispositions testamentaires. Ils réaffirment qu’« aucune position sociale, aussi élevée soit-elle, ne saurait primer sur la loi.»