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Entre querelles d’héritage et manœuvres douteuses, le feu Barthélémy GAMBA n’est pas encore inhumé. Récit des faits.
 Alors que la société centrafricaine attend toujours que justice et traditions coexistent avec dignité, une affaire aussi triste que révélatrice secoue Bangui.

L’architecte Barthélémy GAMBA, décédé depuis le 30 avril 2025, n’a toujours pas été inhumé. Son corps, retenu à la morgue de l’hôpital Communautaire, est devenu l’enjeu d’un conflit familial aux allures de guerre d’héritage mêlée à des règlements de comptes internes.

Un deuil empêché par des conflits d’autorité

Plutôt que de rassembler la famille dans le deuil, la mort de Barthélémy GAMBA a déclenché une querelle sur fond de légitimité, de traditions et de contrôle des obsèques. En cause : le Dr Sylvestre BALIGROSS, frère du défunt, accusé par les enfants de vouloir accaparer l’organisation des funérailles sans leur consentement.

Ce dernier s’est présenté à la morgue dès le 1er mai avec une ordonnance signée sous le nom de « Sylvestre GAMBA », se déclarant représentant légal des enfants GAMBA. Une manœuvre jugée fallacieuse par les enfants GAMBA, qui dénoncent une falsification et une tentative d’éviction pure et simple.

Une justice saisie dans l’urgence… et dans la confusion

La morgue, devant l’ambiguïté de la situation, a sollicité l’arbitrage du Tribunal de Grande Instance de Bangui. Deux requêtes sont déposées par Mlle Emma GAMBA, cadette ultime du défunt a la Cour d’Appel de Bangui pour sursis de décision du TGI qui juge la décision de fallacieuse influencé par la stagiaire juriste Merveille GAMBA.

D’un côté, le frère du défunt invoque la tradition, l’unité familiale et la « confusion » autour de la filiation des enfants. De l’autre, les filles de Barthélémy GAMBA présentent des actes de naissance clairs, un passé familial tumultueux, et dénoncent des intentions peu honorables derrière la précipitation de BALIGROSS à enterrer leur père.

Le 2 mai, avant même la tenue du procès, Sylvestre BALIGROSS tente en catimini de récupérer le corps. Une initiative stoppée de justesse par ses oncles et cousines côté maternelle. Rebelote le 7 mai : cette fois, il revient accompagné de son fils lieutenant des FACA et de plusieurs militaires. Là encore, l’opération échoue face à la vigilance des filles GAMBA.

Ces manœuvres soulèvent une question dérangeante : pourquoi un tel acharnement à enterrer un corps que la justice n’a pas encore autorisé à déplacer ? Les enfants, les cousins, sœurs, nièces, et neveux côté maternel voient une volonté d’étouffer des vérités plus sombres.

« S’il n’a rien à cacher, pourquoi vouloir enterrer notre père à toute vitesse, en dehors de toute décision légale ? », s’interrogent-ils.

Le cas GAMBA illustre un mal plus profond : la récurrence des conflits familiaux en Afrique centrale autour des successions, souvent sur fond de rivalités anciennes, de polygamie, ou de querelles de légitimité. Pire, il met en lumière une dérive inquiétante : l’usage abusif des procédures judiciaires pour légitimer des intérêts personnels, voire des abus de pouvoir, comme l’intervention de militaires dans une affaire purement civile.

Qui était Barthélémy GAMBA ?

Architecte de profession, Barthélémy GAMBA était reconnu dans le milieu urbanistique de Bangui pour sa rigueur, sa discrétion et son engagement envers une architecture fonctionnelle au service des quartiers populaires. Né dans les années 60 à Bangui, il a contribué à plusieurs projets publics et privés, souvent sans chercher la lumière.

Résident du quartier Sica II, il était connu pour son mode de vie modeste et ses liens parfois distendus avec certains membres de sa fratrie. Ses proches décrivent un homme réservé, mais profondément attaché à ses enfants et à quelques amis fidèles. Selon certains témoignages, il vivait ses dernières années dans une forme de retrait, qu’il justifiait par un climat familial devenu pesant.

Il laisse derrière lui un vide professionnel, mais surtout une douleur personnelle exacerbée par un conflit qui, selon ses enfants, aurait été à mille lieues de ses valeurs de respect et d’équilibre.

« Notre père n’aurait jamais voulu que sa dépouille soit tiraillée de la sorte. Ce qu’il méritait, c’est le calme, la dignité et le respect. » déclaré Abigaelle Poudjouwa GAMBA, sa fille.

Ce que révèle l’affaire GAMBA, au-delà des faits, c’est l’incapacité chronique de certaines familles à se rassembler dans la douleur. L’indignité avec laquelle se déroule ce bras de fer autour d’un corps inanimé pose question. Comment une société peut-elle prétendre respecter ses morts, si elle les arrache à la morgue dans la discorde, au mépris de la justice et de la mémoire du défunt ?

Le droit à une sépulture digne est universel. Le priver à cause d’ambitions personnelles, de suspicions non élucidées, ou d’un orgueil familial mal placé, c’est commettre une seconde mort.

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