
La République centrafricaine se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins politiques. Le Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC) a officiellement contesté le calendrier électoral publié par l’Autorité Nationale des Élections (A.N.E) pour la présidentielle de 2026, soulevant des questions majeures sur la légalité et la constitutionnalité de ce processus.
Selon le BRDC, le chronogramme établi par l’A.N.E ne respecte pas plusieurs articles clés de la Constitution du 30 août 2023. Cette contestation n’est pas seulement technique : elle touche au cœur du fonctionnement démocratique et à la légitimité des institutions de la République.
Le calendrier proposé prévoit que le premier tour des élections soit suivi par la publication des résultats provisoires le 5 janvier 2026 et la proclamation des résultats définitifs le 20 janvier. Le second tour, quant à lui, verrait ses résultats provisoires publiés le 23 février, avec proclamation définitive le 10 mars 2026, et une investiture fixée au 30 mars. À première vue, ces dates peuvent sembler respectables, mais pour le BRDC, elles violent plusieurs dispositions constitutionnelles essentielles.
Le BRDC identifie trois violations majeures :
1. L’organisation du second tour dans des délais impossibles : les articles 67 et 68 de la Constitution stipulent des délais précis pour la tenue des scrutins et la validation des résultats. Le calendrier proposé par l’A.N.E ne permet pas de respecter ces délais, rendant toute élection contestable.
2. Le non-respect du terme du mandat présidentiel : selon l’article 185, le mandat en cours doit se terminer à une date bien précise. Or, le calendrier publié repousse de facto l’investiture du président élu au-delà de cette date, menaçant la continuité constitutionnelle.
3. Le dépassement du délai pour la prestation de serment : l’article 71 impose un délai maximum de 45 jours pour l’investiture. La planification actuelle excède ce délai, remettant en cause la légalité de l’investiture elle-même.
Ainsi, selon le BRDC, la proclamation des résultats définitifs du second tour le 10 mars 2026 ferait dépasser le terme constitutionnel du mandat du président en exercice, prévu pour le 24 avril 2026. Ce décalage n’est pas un détail technique : il compromet la légitimité de l’État et ouvre la porte à des contestations internes et internationales.
La double posture du BRDC
En invoquant la Constitution de 2023, le BRDC reconnaît sa légitimité comme texte suprême, tout en mettant le pouvoir en place face à ses multiples contradictions. Cette stratégie souligne que la contestation n’est pas dirigée contre la Constitution elle-même, mais contre le non-respect de ses articles par ceux qui détiennent le pouvoir. Le BRDC se positionne ainsi comme garant du texte constitutionnel et veilleur critique de l’action gouvernementale, un rôle essentiel dans la préservation de l’État de droit.
Sur le plan international, il compte saisir les institutions spécialisées, telles que la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, le Secrétaire général de l’ONU, ainsi que l’Union Européenne et les États-Unis. L’objectif est de faire pression pour que les principes constitutionnels soient respectés et pour prévenir tout vide institutionnel.
Sur le plan national, le BRDC prévoit d’organiser dès octobre 2025 des marches et des meetings de protestation. L’enjeu n’est pas seulement électoral : il s’agit de rappeler à tous les acteurs politiques que la Constitution n’est pas un document décoratif, mais la base sur laquelle repose la stabilité du pays.
Cette prise de position du BRDC souligne une vérité incontournable : la République centrafricaine ne peut se permettre d’ignorer ses propres règles fondamentales. Les élections, pierre angulaire de la démocratie, doivent respecter scrupuleusement les dispositions constitutionnelles. Tout manquement pourrait entraîner des crises politiques et sociales, fragiliser les institutions et compromettre la confiance des citoyens.
La contestation du BRDC n’est pas un acte de blocage, mais un rappel à l’ordre : la légitimité des élus et la stabilité nationale dépendent du respect des textes fondateurs. Ignorer cette alerte reviendrait à fragiliser durablement la démocratie centrafricaine, au moment même où le pays cherche à consolider ses institutions et à se projeter vers l’avenir.
Le chronogramme électoral publié par l’A.N.E apparaît, selon le BRDC, comme illégal et anticonstitutionnel. Plus qu’une simple contestation, cette situation appelle à une vigilance accrue des citoyens, des partis politiques et des acteurs internationaux. La Constitution de 2023, récemment adoptée, n’est pas un simple texte : elle doit guider toutes les décisions, y compris celles qui concernent le calendrier électoral.
Le BRDC rappelle à l’ensemble des acteurs que la République centrafricaine mérite des élections transparentes, légales et respectueuses de ses principes fondamentaux. Tout retard ou dérogation pourrait avoir des conséquences profondes sur la stabilité et la légitimité du pays. Le temps n’est plus à la passivité : il est à la défense de la Constitution et de l’État de droit.