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Ce jeudi 17 avril 2025, le soleil ne s’était pas encore levé sur les plaines arides de l’Alibori, au nord du Bénin, quand les premiers tirs ont déchiré le silence. Vers 4h du matin, plusieurs dizaines de combattants lourdement armés ont simultanément attaqué au moins deux casernes militaires situées à Wada et Koudou, dans ce qui est désormais considéré comme l’attaque la plus meurtrière de l’histoire militaire du Bénin.

Selon une revendication officielle diffusée par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda, 70 soldats béninois ont été tués, des dizaines d’autres blessés ou portés disparus. L’attaque a également conduit à la saisie massive d’armement militaire, dont certains issus d’approvisionnements récents auprès de puissances étrangères.

Une attaque coordonnée, méticuleuse, brutale

D’après plusieurs sources militaires et sécuritaires, les assaillants sont arrivés en groupes mobiles, à bord de pick-up et de motos, et ont utilisé des armes lourdes dès les premiers instants. Les casernes visées n’étaient pas de simples postes avancés, mais des bases stratégiques destinées à surveiller les mouvements djihadistes transfrontaliers.

« C’était une attaque planifiée, pas une incursion classique », confie un officier sous couvert d’anonymat. « Ils ont frappé nos points de communication en premier, puis sont passés aux dépôts de munitions. Nos hommes n’ont eu que quelques minutes pour riposter. »

Plusieurs témoins civils dans les villages voisins rapportent avoir vu les flammes illuminer le ciel. Des familles se sont réfugiées dans la brousse pendant des heures.

Un butin militaire impressionnant

Le bilan matériel est aussi stupéfiant que le choc humain. Selon les images diffusées par le groupe War Noir, spécialisé dans l’analyse d’armement saisi par des groupes armés :

78 fusils d’assaut

22 mitrailleuses PK(M)

3 drones de reconnaissance

Des mortiers PP87 (Chine)

Des mitrailleuses M2HB (États-Unis)

Des lance-roquettes Type 69 et obus T69-1

Des fusils Type 56-1, Type 81-1

Des obus à roquettes (RAP)

L’arsenal capturé témoigne d’un équipement moderne, voire sophistiqué, que l’armée béninoise avait en partie acquis grâce à des coopérations avec la Chine, les États-Unis, ou encore la Russie.

Le Bénin, nouvelle cible dans l’expansion djihadiste

Longtemps considéré comme un havre de stabilité en Afrique de l’Ouest, le Bénin fait face depuis 2021 à une pression croissante des groupes armés opérant depuis le Burkina Faso et le Niger. L’Alibori, département frontalier, est aujourd’hui le front avancé d’une guerre asymétrique qui ne dit pas son nom.

Le GSIM, déjà actif au Mali, au Burkina Faso et au Niger, cherche désormais à étendre sa zone d’influence vers le golfe de Guinée. L’attaque de Wada-Koudou pourrait marquer un tournant dans cette stratégie.

« Le message est clair : le Bénin n’est plus une exception. Il est désormais une cible », résume un analyste de l’Institut d’études de sécurité basé à Dakar.

Le gouvernement béninois n’a pas encore publié de bilan officiel détaillé, mais a décrété un deuil national de trois jours. Le président Patrice Talon, revenu précipitamment d’une visite à l’étranger, a convoqué un Conseil de sécurité exceptionnel à Cotonou.

Une enquête interne a été ouverte sur les failles sécuritaires. Des interrogations surgissent quant à la capacité de l’armée béninoise à résister à une guerre d’embuscades et de guérilla, pour laquelle elle n’était historiquement pas préparée.

Des appels à renforcer la coopération militaire régionale – notamment avec le Ghana, le Togo et la Côte d’Ivoire – se multiplient.

L’attaque de Wada-Koudou n’est pas un événement isolé, mais le symptôme d’une reconfiguration du front sahélien. Le Bénin se trouve aujourd’hui face à un choix difficile : militariser davantage ses frontières, au risque de perdre la confiance des populations rurales, ou renforcer ses capacités de renseignement et d’alerte précoce en s’alliant à ses voisins.

Quoi qu’il en soit, le 17 avril 2025 restera une date charnière dans l’histoire du Bénin. Un jour où, dans l’obscurité du nord, la guerre est entrée sans frapper.

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