Ayant réussi à s’offrir « sa » nouvelle Constitution, Faustin Archange Touadéra règne depuis en maitre absolu sur la Centrafrique. Son opposition, réduite à se servir de la stratégie de boycott des futures élections locales, peut-elle (vraiment) faire reculer l’homme du 30 Mars dans sa détermination inavouée à s’octroyer un troisième mandat ? Analyses et décryptages.
« En huit ans de gouvernance, Touadéra n’a rien changé ». C’est sur ce ton complètement tranché que le chef de file de l’opposition Anicet Georges Dologuele s’est adressé à la presse lors des festivités marquant les dix ans d’existence de son parti. D’ajouter « l’URCA ne participera pas aux prochaines élections locales tant que la Constitution du 30 Aout ne soit toilettée et que les institutions en charge de ces élections ne soient réformées ». Voilà qui est clair ! Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution voire des mois avant, le dialogue est systématiquement rompu entre le pouvoir et l’opposition. La majorité présidentielle se targue d’avoir le soutien du peuple, pendant ce temps, les partis politiques, eux, qualifient l’actuel président de « putschiste ». Un vrai concert de dénonciation !
« Disqualifier les principaux leaders de l’opposition »
Pour les observateurs de la vie sociopolitique centrafricaine, la Constitution adoptée en 2023 ne vise qu’à disqualifier les figures de proue de l’opposition. Dologuele, Ziguele, Meckassoua, Bokassa, Mboli-Goumba, tous ces leaders ont soit la double nationalité, soit revendiqué une origine étrangère, et la nouvelle loi amenuise leur espoir à briguer la magistrature suprême. Une « injustice » contre laquelle ces barons de l’opposition disent pouvoir se battre « jusqu’au bout ». Seulement, disposent-ils des moyens nécessaires pour venir à bout de leurs luttes ?
« Oppression économique »
Conscient des moyens de l’Etat sur lesquels il peut compter pour pouvoir se maintenir, le régime de Bangui mise sur l’affaiblissement économique de ses adversaires politiques. En Mars dernier, l’opposant Crépin Mboli-Goumba a été condamné par la justice pour « outrage à magistrats » ; il doit de ce fait à peu près 100 millions de FCFA à ses adversaires d’après le premier verdict. En plus, ses entreprises économiques sont durement menacées par l’administration fiscale témoignent les proches de l’opposant. Au-delà de Mboli-Goumba, c’est la quasi-totalité des opposants qui disent être victimes de « l’oppression économique » des hommes du pouvoir.
En Centrafrique, l’interdiction des manifestations publiques pour les associations et partis d’opposition reste toujours d’actualité. Une situation qui empêche les leaders politiques de communiquer en masse avec leurs bases. Sans compter les nombreux débauchages au sein des partis opposés au pouvoir, ce qui met en mal les actions du contrepouvoir à pouvoir incarner une réelle alternance. Face à ce tableau ainsi dépeint, il ne reste qu’à l’opposition des communiqués de presse de routine ou les traditionnelles conférences de presse sans grande émulation pour faire entendre sa voix. Vis-à-vis d’un pouvoir qui se renforce chaque jour tant financièrement que militairement, l’opposition a-t-elle encore de la chance de renverser les tendances ? C’est bien ce que l’on attend de voir pour les très prochains mois.