
À l’approche du renouvellement des membres du bureau du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) de la République Centrafricaine, un climat de méfiance et de tension s’installe. En dépit de son rôle constitutionnel fondamental en tant que deuxième chambre législative, le CESE semble pris dans un tourbillon de préoccupations internes qui soulèvent des interrogations cruciales son avenir politique.
Conformément aux règles établies par la loi organique et le règlement intérieur, le CESE procédera dès demain Mardi 18 Février 2025, à l’élection de ses nouveaux responsables pour l’année 2025. Ce conseil, dont la mission est de conseiller le gouvernement et le parlement, ainsi que de participer à l’élaboration et à l’évaluation des politiques publiques, pourrait bien se retrouver à la croisée des chemins. En effet, la perspective d’un renouvellement des membres s’accompagne d’une question épineuse : celle du clanisme et du népotisme qui semble ronger l’institution.
« Des tensions ethniques au cœur du renouvellement »
Le climat actuel, qui marie politique et ethnies, est lourd de menaces. Une grande partie des conseillers actuels, notamment ceux issus de l’ethnie Yakoma, sont accusés de faire primer leur appartenance tribale sur les intérêts collectifs du pays. Bien que certains membres de cette ethnie échappent à cette critique, la question de l’influence de ce groupe dans la politique nationale, en particulier au sein du CESE, reste au centre des débats.
« Les conseillers centrafricains sont pris dans un tourbillon de clientélisme et de régionalisme qui dénature totalement les valeurs républicaines et compromet le développement de notre pays », déclare un ancien membre du Conseil. La montée en puissance de certaines communautés et leur domination perçue, notamment au sein des forces armées ou des institutions publiques, a doublé les tensions interethniques et entravé l’effort national de réconciliation et de cohésion sociale.
« Le poids du passé : une gouvernance marquée par les divisions »
Il n’est pas sans rappeler que la Centrafrique, avant même la chute de François Bozizé et l’émergence de la coalition Séléka, était déjà un terrain fertile pour les divisions tribales et claniques. Cette problématique, longtemps ignorée ou minimisée, continue de hanter la politique du pays. Le dernier recrutement au sein des Forces Armées Centrafricaines (FACA) est un exemple flagrant de cette dérive : des critères de recrutement basés sur des appartenances ethniques, régionales et personnelles, au lieu d’être fondés sur des compétences et l’unité nationale.
Ce népotisme, que certains membres du CESE perpétuent, a conduit à une gestion publique souvent chaotique et inefficace, ce qui a entraîné une crise de gouvernance qui se poursuit encore aujourd’hui. Si certains prétendants au renouvellement de ce bureau se targuent d’incarner le changement, nombreux sont ceux qui remettent en question leur intégrité et leur capacité à servir les intérêts du peuple.
Le danger d’une gouvernance tribale, au-delà des simples polémiques internes, est majeur pour l’avenir de la Centrafrique. Une telle dérive fragiliserait encore davantage les institutions démocratiques, au point de les rendre vulnérables à des manipulations extérieures. Cela risquerait également de raviver des tensions interethniques et religieuses déjà présentes dans le pays, un terreau fertile pour l’ingérence de puissances étrangères, qui pourraient exploiter les failles du système politique centrafricain.
De plus, cette gouvernance basée sur le tribalisme et le clientélisme compromettrait l’élan nécessaire pour le développement économique et social du pays. En l’absence de réformes structurelles profondes, la Centrafrique pourrait se retrouver à la traîne des nations africaines en termes de croissance, d’industrialisation, et de progrès social.
« Le rôle du président Faustin Archange Touadéra »
Face à cette situation, le président Faustin Archange Touadéra se trouve à un tournant critique de son mandat. L’enjeu est clair : il s’agit de redonner au peuple centrafricain la possibilité d’espérer, de restaurer la confiance dans les institutions et de mettre fin à la spirale de l’injustice sociale et politique. La question du clanisme et de l’ethnicise au sein du CESE ne doit plus être un simple sujet de débats, mais un combat contre les antivaleurs qui ont longtemps miné l’avenir du pays.
« Les Centrafricains ne veulent plus de divisions, de conflits ethniques ou de manipulations. Ils ont soif de justice et de cohésion, c’est donc sur cette prise de conscience collective que le futur du pays repose, avec un impératif : la cohésion sociale ne doit pas être sacrifiée sur l’autel des intérêts personnels et ethniques », affirme un conseiller actuel.
La Centrafrique doit impérativement faire face à ses démons et repenser son modèle de gouvernance pour éviter que l’ombre du clanisme et du népotisme ne continue de ternir l’avenir du pays. Le peuple centrafricain mérite une politique à la hauteur de ses aspirations, basée sur l’unité, l’équité et la justice sociale.