« Je n’ai ni le soutien des français, ni des russes ». C’est sur ce ton cash que « l’ex chef rebelle chéri » de Faustin Archange Touadéra a décidé de répondre à notre rédaction alors que nous l’interviewions, hier, par rapport au supposé soutien occidental qu’il recevrait dans le cadre de ses opérations militaires. Assez suffisant pour croire que Ningatoloum Sayo fasse actuellement « cavalier seul » avec le groupe militaire qu’il a récemment créé ? Pas si sûr en effet !
Même si officiellement, les autorités centrafricaines affirment que la situation sécuritaire du pays est sous contrôle, il n’en demeure pas moins qu’au sein de l’appareil de l’Etat, les menaces qu’inspire la Coalition Militaire pour le Salut du peuple et le Redressement (CMSPR) de Sayo soit prise très au sérieux tel que l’a souligné un agent des renseignements généraux centrafricains lors d’une interview, hier, avec un des membres de notre rédaction. En réalité, les soutiens extérieurs dont il bénéficie, sa fougue (pour avoir été anciennement maquisard), la capacité opérationnelle de ses hommes, sont autant d’atouts qui font dire à Bangui que Sayo n’est pas seul dans sa marche. Et l’homme ne s’en cache pas d’ailleurs. Interrogé par « Afrique en plus », il n’a pas caché ses liens avec les FSR du Général soudanais Hemeti. Et de telles informations devaient faire l’objet, entre autres, du tête-à-tête prévu entre Faustin Archange Touadéra et le fils Déby prévu à Bangui.
Mais qu’on accuse Sayo de bénéficier du soutien de Kiev, nul n’est en mesure de l’étayer par de preuves irréfragables –même si l’on est conscient de l’implication récente de soldats ukrainiens dans une frappe contre les soldats maliens et russes à Tinzaouatene, au Mali, dans un contexte de guerre par procuration entre Kiev et Moscou. Et, il n’est pas surtout exclu que dans le cadre de sa volonté de réduire les capacités de nuisance de son adversaire militaire qu’est la Russie, l’Ukraine pourrait, dans une certaine mesure, soutenir des rebelles centrafricains, qui disent sans rechigner que leur rôle est d’en finir avec « la prédation russe » en Centrafrique et « rétablir la démocratie ».
De telles inquiétudes ont le mérite de pousser les renseignements centrafricains à prendre évidemment au sérieux les menaces de Sayo et son groupe, le CMSPR ; surtout dans un contexte marqué par la chute de Bachar El-assad, lui aussi soutenu par Moscou face à l’offensive d’une coalition militaire, appuyée certainement par des forces extérieures.
Bref, Bangui n’est pas Kiev, et vice-versa. Et ce qui est sûr, loin de nous d’encourager une quelconque libération du pays par la force des canons. Car dans l’un ou dans l’autre cas, nous savons ce que les coalitions militaires hétéroclites ont fait de ce pays, à commencer par les banyamulengue et les Seleka. C’est ici qu’il sied de demander à Armel Ningatoloum Sayo qui semble faire du maquis sa profession de bien vouloir s’associer aux forces politiques qui appellent à un dialogue politique et inclusif que d’appeler à un sursaut militaire qui pourra encore faire régresser le pays de dix ans.