Connu pour son calme légendaire, c’est presqu’avec un silence méprisant que l’ancien diplomate centrafricain a tenu répondre à ses adversaires. Si on lui a retiré des heures de cours de Sciences Politiques à l’Université de Bangui, au motif qu’il serait un opposant au régime du 30 Mars 2016, Charles Armel Doubane réintègre ainsi une fois de plus, une fois de trop la liste des « Wanted » du pouvoir centrafricain.
« L’affaire Doubane » ressemble presque à ces chroniques servies par les juntes du Sahel, où quiconque ne fait pas la volonté du « roi manitou » est d’office classé du côté « des ennemis du gouvernement », des « traitres à la Nation ». Seulement que cette fois, ça se passe bien en Centrafrique, République prétendument démocratique, plus est dirigée par des professeurs.
Qui pouvait croire que le fait pour Charles Doubane de refuser de penser comme ceux qui nous gouvernent, pouvait pousser le conseil administratif de l’Université de Bangui à lui retirer des heures des cours !? En tout cas, sans le savoir, la dernière pantalonnade signée par nos universitaires, restera à jamais une tache d’huile sur la chemise du Président Touadéra. Lui qui fort de son statut de président continue de dispenser des cours à la faculté, comme pour montrer son attachement au monde universitaire.
En vérité, l’affaire ne devrait pas susciter autant d’émules si la probité morale et intellectuelle (valeurs cardinales reconnues aux hommes de science) pouvait guider un tant soit peu nos universitaires. Or, force est de constater que les régimes qui sont succédés ces trois dernières décennies nous ont révélé au grand jour la face sombre de nos intellectuels. Au demeurant, l’on est presque tenté de croire que la dernière sanction qui a frappé l’ex-ministre des affaires étrangères, est une boutade de trop. Car non seulement elle prive l’unique université de Bangui de ses meilleurs talents, pire elle institutionnalise carrément la répression politique au sein du temple du savoir.
Me Zarambaud Assingambi (paix à son âme !) avait-il tort d’affirmer naguère que « la République centrafricaine est le pays de tous les paradoxes et des records négatifs » !? En analysant sa célébrer maxime, on est tenté de croire qu’il était dans une certaine forme de prémonition.
Doubane réprimé, et après ?
Le seul message qui vaille, et qui doit être compris des détracteurs de l’ancien ministre est celui de croire que « les régimes politiques passent, tandis que la République demeure ». A l’instar de notre célèbre confrère guinéen Habib Marouane Camara toujours aux mains de ses ravisseurs, nous tenons à dire que « nul n’est éternel. Personne n’est Dieu ! ». Car si sanctionner Doubane peut s’exprimer comme une forme d’excès de zèle ou de loyauté envers l’actuel Chef de l’Etat, il n’en demeure pas moins que les faits politiques sont têtus, et finissent toujours par rattraper ceux qui se mettent du mauvais côté de l’histoire.
Pour Charles Armel Doubane, ancien grand séminariste de son état, habitué à la persécution, la dernière répression n’est qu’un test qui va conduire à la grandeur. Comme le dit ce dicton populaire « aux grands hommes, les grandes persécutions ». Décider de répondre à la brimade par le silence, est déjà signe de sagesse, en plus du fait qu’accepter la souffrance en restant fidèle à soi-même est la qualité des grands leaders !